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La grande mascarade des journées de la persévérance scolaire

Lorsqu'un système d'éducation est davantage basé sur les conventions et les traditions, il va de soi que les élèves, eux, se présentent en classe par obligation et non par intérêt.
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Les journées de la persévérance scolaire au Québec battent leur plein. Ainsi, une fois par année, on part en croisade pour faire la promotion de la persévérance scolaire au Québec. On ne peut pas être contre la vertu. Cependant, au-delà de ces beaux mots et des ces quelques actions ici et là, il serait approprié de nous questionner sincèrement à savoir si nous ne contribuerions pas plutôt au décrochage scolaire...

La pédagogie active

L'apprentissage serait favorisé par le plaisir que l'on éprouve à mener une tâche. Il faut cesser de considérer l'apprentissage par un simple processus cognitif. Nous le savons, la sphère émotive est omniprésente chez les jeunes d'âge secondaire. En faire abstraction dans notre intervention éducative quotidienne est une grave erreur. La motivation et l'engagement sont des éléments incontournables pour façonner l'apprentissage. Une pléthore de recherches existe à ce sujet et la formation des maîtres témoigne bien de cette importance lorsqu'il est question de signifiance : le pourquoi de l'apprentissage.

Tous connaissent les concepts de motivation extrinsèque et celui de motivation intrinsèque. Autrement dit, celle qui provient de l'environnement, donc des stimuli extérieurs et celle qui provient de l'individu, de son for intérieur, avec tout son schème de perceptions et de conceptions. S'il est relativement facile pour le milieu de modifier les conditions externes à l'élève pour espérer allumer son intérêt à apprendre, il en est tout autre en ce qui concerne sa perception de l'apprentissage à réaliser. Néanmoins, il existe une panoplie de stratégies de pédagogie active dont les effets auront comme prétention de rendre l'élève actif dans ses apprentissages. Un élève actif en est souvent un qui s'engage et qui intègre une tâche donnée. Il la vit, il la fait sienne. Il y tient, il est motivé car il détient un pouvoir décisionnel dans la démarche pédagogique.

Les apprentissages durables sont ancrés dans l'action. L'élève y dégage un niveau d'investissement où il édifie son estime personnelle à réaliser une tâche au lieu de témoigner de la compétence d'un enseignant à y parvenir. Lorsqu'un système d'éducation est davantage basé sur les conventions et les traditions plutôt que sur le plaisir d'apprendre et sur la nécessité d'innover, il va de soi que les élèves, eux, se présentent en classe par obligation et non par intérêt. Et à partir de ce triste moment, les problèmes commencent! Trop de jeunes font du temps à l'école. Ils sont démotivés et désengagés de leur propre parcours. C'est tragique!

Une mascarade

Pour en revenir aux journées de la persévérance scolaire, l'initiative est louable, quoique... tortueuse. On incite nos élèves à persister dans un système d'éducation qui est rigide et qui refuse de se moderniser. Ils persévèrent dans un milieu qui ne leur ressemble pas et qui ne fait pas le nécessaire pour s'adapter à leur réalité. Vous connaissez d'autres entreprises qui refusent de se modeler aux besoins de leur clientèle et qui survivent aussi longtemps? À quoi bon souligner une semaine dans l'année scolaire alors que le reste du temps, le monde de l'éducation refuse obstinément de se mettre au diapason de la réalité des élèves? Que fait-on concrètement et de façon durable pour favoriser la persévérance scolaire? Quand cesserons-nous de considérer le décrochage scolaire comme un phénomène externe plutôt que le résultat de nos échecs en tant que système scolaire? Il faut travailler en amont en modifiant nos stratégies d'enseignement et la culture organisationnelle du système scolaire. Les initiatives de la persévérance scolaire actuelles s'inscrivent en aval. Elles reconnaissent un problème qui ne devrait pas exister et elles l'abordent par des mots et des initiatives de sensibilisation. Une vraie mascarade, à grands frais ! Ce que nos élèves nécessitent, ce sont des gestes quotidiens, intégrés à l'enseignement, allant de la pédagogie à la didactique des enseignants.

En somme, à ce siècle, plus que jamais, l'école n'est plus le lieu consacré qui détient le monopole des conditions liées à l'apprentissage. Cette école québécoise est en compétition avec son entourage qui sait fréquemment comment stimuler la créativité et la curiosité de nos élèves. Grâce aux technologies de l'information et de la communication, ces derniers peuvent accéder à tout un éventail de connaissances qu'ils détiennent au creux de leur poche, via leur téléphone intelligent. École et apprentissage ne sont donc plus intimement indissociables.

Il n'est pas trop tard pour s'inscrire dans la modernité et prendre le virage nécessaire au lieu de se lamenter sur les effets néfastes du décrochage scolaire dans notre société. Ainsi, via les journées de la persévérance, nous célébrerions nos succès au lieu de brandir l'épouvantail socio-économique à nos jeunes pour les convaincre de demeurer sur les bancs d'école. La peur et la contrainte n'ont jamais donné de bons résultats dans le monde de l'éducation. Les statistiques sur le décrochage sont là pour nous le rappeler cruellement. Il faut donc impérativement se sortir la tête du sable et voir au-delà de l'aspect statistique et économique du décrochage scolaire pour enfin l'aborder en tant qu'indicateur annonçant une véritable tragédie éducative contemporaine.

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